Comme chaque passionné qui se respecte, en affinant un peu les jugements, on finit toujours par trouver son violon d'Ingres, sa marotte obsessionnelle, une niche bien particulière dans laquelle on passerait un peu plus de temps qu'ailleurs. Ce n'est pas forcément ce que l'on trouve de meilleur, ce n'est pas l'exception, mais plutôt ce petit coin personnel, une sorte de jardin dans lequel on se sent bien, où il fait bon vivre sa passion, loin du tumulte des réflexions pointues que demande le jusqu'au boutisme engendré par cette impétueuse déraison pinardière.
Personnellement, dans la ferveur liée à cette affection pour le jus de treille, ma petite citadelle secrète, le tendre béguin aiguisant mes papilles quand la simplicité des plaisirs toque à la porte, le vent de fraicheur glissant tendrement jusqu'au bout de mes veines, n'a pas le revers de manche d'un capitaine, ni le pedigree d'une lignée ampélographique des plus distinguées. Non, mon dada à moi c'est le cinsault...
Oui, le cinsault, ce prolétaire des terres sèches, ce grain travailleur fournissant quantité de jus que l'on qualifie souvent de simple, cette égérie du rosé sudiste, jouant avec facilité, mais sans grande passion, une partition aussi pâle que les reflets saumonés d'une robe d'oripeaux valsant au dessus d'un barbecue. Et pourtant, bien dirigé, dans le charme plus sombre d'un drapé sanguin, il est capable d'étendre toute sa finesse, sa fraicheur, comme un pinot ou un gamay ayant profité du soleil pour exhiber son teint halé et son accent roulant les R. Bienvenue donc dans mon modeste temple de la gourmandise et de la finesse. Bienvenue dans le sud, berceau de cet élu bien méconnu, pour un rendez-vous régulier autour de la grappe et du verre, faisant le part belle à notre souverain de l'honnête plaisir.
J'espère que vous prendrez autant de plaisir à découvrir ces diverses cuvées et vignerons, mettant à l'honneur le cinsault, que j'ai à les déguster ou bien, plus souvent, à les boire...
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Le premier ambassadeur de cette chronique a pris racine en terre languedocienne. À vrai dire, c'est aussi par lui et sa cuvée Le Pradel (100 % cinsault, une vingtaine d'euros la bouteille) que je suis entré de plain pied dans mon petit paradis fait de fruits rouges, de fleurs et de paillettes (non, oubliez les paillettes). Et le responsable de cette addiction particulière, n'est autre que Xavier Braujou, talentueux vigneron de Saint Jean de Fos, capitale d'un Languedoc élitiste, mais pas trop, préférant le confort des bottes en caoutchouc à celui des mocassins à glands, d'une utilité moindre quand il s'agit de surveiller sa vigne.
Alors, le cinsault, petit vin des champs, prend une toute autre ampleur à la lumière du travail d'orfèvre de celui qui tient les rennes du Domaine La Terrasse d’Élise. Entre Aniane et Saint Jean de Fos, sur des terroirs jouxtant les médiatiques et non moins emblématiques Grange des Pères et Mas de Daumas Gassac, poussent quelques hectares de ce nectar régional. Un sol argilo-calcaire sur lequel pointe le dos rond de quelques menus galets, un soleil imposant le port de la casquette et le badigeon de Biafine, et qui ne freine aucunement le cinsault dans sa quête de fraicheur et d'élégance.
Après une année passée à l'ombre des douelles du sieur Braujou, sort de sa cave un jus méritant un peu de repos pour s'exprimer pleinement. Mais après quelques mois ou quelques années de garde, la mise en pli parfaite de cette cuvée Le Pradel décoiffe assurément par son style. Et quand la jeunesse d'un 2010 éclabousse la bouche de sa fraicheur et de ses notes de bois de rose, que le fruit vif et gourmand éclate sur le palais, l'assemblée ne peut qu'adouber ce seigneur languedocien.
Après une année passée à l'ombre des douelles du sieur Braujou, sort de sa cave un jus méritant un peu de repos pour s'exprimer pleinement. Mais après quelques mois ou quelques années de garde, la mise en pli parfaite de cette cuvée Le Pradel décoiffe assurément par son style. Et quand la jeunesse d'un 2010 éclabousse la bouche de sa fraicheur et de ses notes de bois de rose, que le fruit vif et gourmand éclate sur le palais, l'assemblée ne peut qu'adouber ce seigneur languedocien.
Et quand les années passent me direz-vous ?
Le 2006 partagé la semaine dernière ne ternira pas l'image de ses cadets. Un vin au style bourguignon, les notes de bois nobles tant appréciées sur la jeunesse se fondent dans un meltingpot d'épices ; et la cerise à noyau, un temps en retrait face à tant d'esprit voyageur, vient ramener sa fraise dans un flot limpide, souple, faisant de ce vin, un jus que l'on ne déguste plus, mais que l'on boit à bonnes lampées. Terriblement efficace...
Mais surtout, si la description de ce vin ne suscite chez vous qu'un intérêt modeste, ne vous culpabilisez pas. Déjà qu'il n'y a pas assez de ces Pradel pour satisfaire tout le monde, on ne vous en tiendra pas rigueur. Au fait, dans le silence bonificateur de la cave de ce bienfaiteur de Xavier Braujou, il se murmurerait qu'un de ces cinsaults locaux, subirait un traitement de faveur depuis bientôt deux ans... mais non, chut, la coupe est pleine, à la vôtre !
David Farge "ABISTODENAS"
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CINSAULT(veur) à la carte...
Carte des cuvées de cinsault dégustées sur le blog :
Bu Le Pradel il y a peu dans une série de cuvées du Languedoc ... un beau vin !
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