Un peu de tri !

samedi 1 novembre 2014

Blogus Vinus, dinosaure en voie de disparition...

Le blogueur vin est-il en voie de disparition ? C'est en tout cas le propos tenu (si toutefois celui-ci ne venait pas à se professionnaliser un peu) par quelques "penseurs" du vin.

Il est vrai que de donner du crédit aux blogueurs en général est une attention louable qui pose encore un peu plus la question de la place du quidam, du passionné, du journaliste refoulé ou du simple bavard ayant envie de partager son sentiment sur la toile. En ce qui me concerne, il y a longtemps que je voulais écrire à propos de l'activité de "blogueur". Je n'ai jamais vraiment osé, car premièrement je crois que je ne me prends pas assez au sérieux pour m'accorder un crédit d'analyse suffisant sur la chose, et deuxièmement, car les récits introspectifs ou les pauses méta-cognitives ne sont pas forcément ma raison d'être et d'écrire. 
Bref, la perche est aujourd'hui tendue, et je me sens d'humeur taquine pour la saisir et partager avec vous ces quelques lignes, ce léger bordel idéologique à propos de cet ambigu exercice qu'est l'écriture d'un blog. Car on ne fait pas du blogging comme on part se remuer l'arrière-train lors de son jogging matinal. Quand on écrit, il faut tout d'abord accepter d'être lu. Évident me direz-vous ! Pas tant que ça, car suivant qui lira vos bons mots (ou moins bons), la liberté de ton du blogueur dérangera peut-être. En effet, comme dans l'immense majorité des cas il ne touche pas un rond avec ce qu'il écrit, difficile d'avoir une main mise sur le clavier du scribouillard derrière son écran. Seul l'auteur pourra donc s'enquérir (ou pas) de son lectorat et des retombées de son propos. Après sélection, ces articles deviennent donc matière peu onéreuse, facilement exploitable, qui permet de proposer du contenu sans pour autant débourser un centime. C'est ce qu'ont bien compris quelques sites, proposant des revues de presse (sic) thématiques, clef en main, à leur lectorat, sous la forme de rétroliens bien pratiques. C'est gratuit, servez-vous ! Le blogueur aimant bien voir son ego flatté, il se contentera de statistiques de lecture en légère hausse, à moins qu'il ne s'en foute un peu, ce qui est finalement souvent le cas...
Mais là n'est sûrement pas le problème. Comme dit un peu plus haut, là où se joue véritablement la chose, c'est évidemment sur le contenu de ces billets. Car là où une rémunération peut éventuellement, et c'est regrettable, entrainer une ligne éditoriale lisse, consensuelle et souvent bien chiante, avouons-le, la gratuité de l'information, souvent nourrie par une passion et un désir du partage chez son auteur, ne permet que rarement une modération du propos. Alors certes, il n'est pas très gênant de voir quelques excités du clavier gueuler dans leur coin, mais dès que le lectorat se veut légèrement conséquent, cette liberté de ton, attise parfois la controverse et le débat. 

Intéressant me direz-vous ! Car quoi de mieux que des avis divergents pour faire avancer les diverses réflexions engagées ? 

Le problème, vous l'aurez compris, c'est que derrière ce parasitage de l'information de masse, il y a une industrie, des profits et une certaine vision inaltérable du marché. Alors, que quelques petits cons viennent mettre un peu de friture sur la ligne, ça gonfle un peu. Le pluralisme idéologique n'a jamais eu très bonne presse auprès des adeptes de l'uniformisation idéologique et consumériste. Et la place du blogueur dans cet univers fait de pertes et de profits a eu vite fait de mettre en branle tout un processus de phagocytose ou d’absorption desdits trublions. Preuve en est, de façon plus criarde encore, chez nos voisines les blogueuses "mode", "voyage", "puériculture" et j'en passe. Généralement nourries aux petits cadeaux, échantillons et invitations en tout genre, elles régurgitent le plus souvent quelques publi-reportages, publicités déguisées, qui n'ont plus rien de la critique constructive et indépendante aux origines du blogging. 
On l'oublie trop souvent, mais la critique peut être positive comme négative, c'est d'ailleurs ce qui fait avancer le schmilblick. Certains font d'ailleurs aisément commerce de ces argumentaires au vitriol, laissant l'exégèse de leur domaine de prédilection aux plus intègres d'entre-eux. Ainsi, accepter l'indépendance du propos, la liberté d'expression, c'est aussi accepter la critique dans son ensemble, avec ses ratés, ses incohérences, ses désaccords, son incompressible part de débat (stérile ou pas), la diversité de ceux qui la nourrissent... 

Mais point trop n'en faut, car pour en revenir à l'article relayé en préambule de ces quelques lignes, le blogueur trouverait son salut en rentrant dans le rang et en acceptant de monétiser son propos. Une forme de prostitution moderne en quelque sorte... présentée, certes, comme un deal gagnant/gagnant, mais au passage, et cela semble anecdotique, vidé de tout embryon critique. Il parait que dans la vie, tout a un prix. Mais qu'en est-il de celui d'une passion ? On entre dans la blogosphère parce qu'on a quelque chose dire, il serait dommage de s'y épanouir simplement parce qu'on a quelque chose à vendre.
La liberté de ton dérange, qu'il en soit ainsi... Et si l'on y tient vraiment, sachons que la liberté ne se mendie pas, elle se prend. C'est pourquoi il est assez révoltant de croiser ce genre d'argumentaire s'affranchissant allègrement de la sincérité des propos partagés, pour n'y voir que le versant fade et indigeste d'une information à l'apparence de chaîne alimentaire où l'obédience est de rigueur. 

Que les écrits pleins d'affect, d'authenticité, non dénués pour autant de discernement que ces gens considèrent comme du folklore ou de l'amateurisme ne touchent pas ces comptables de l'écriture est une chose. Mais que l'on parle de vin ou d'autre chose, il est fortement regrettable de penser qu'il y ait tout le temps, à chaque instant, un marché à y glaner et notamment celui des plaisirs simples de la vie, qui se joue plus souvent autour d'une table avec quelques amis que derrière une caisse enregistreuse ou en simple homme-sandwich.

1 commentaire:

  1. T'inquiète David, il y aura toujours de vrais gens pour lire et partager de vrais avis sur les sujets qui comptent vraiment dans la Vie. Le monde n'est pas fait que de consommateurs et de chiffre d'affaire. Il est fait d'humanité et de passion. C'est là que le parler-vrai du passionné - par exemple le blogueur - trouve toute sa justification. Et le Marché n’y pourra jamais rien changer. Le blogueur vin est-il un dinosaure en voie de disparition ? C’est un vœu pieu de certains mais aussi un aveu d’impuissance face au parler-vrai des vrai gens.

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